
Il y a des moments dans notre vie où nous sommes bien disposés à entendre la vérité qui nous délivrera, le mot d'amour qui nous désarmera. Le kairos est le don grâce auquel nous savons saisir cette occasion opportune chez autrui. Un instant plus tôt ou plus tard, la parole bienfaisante serait blessante. Les anciens Grecs attachaient une telle importance à ce don qu'ils en ont fait une divinité; ils représentaient sous la forme d'un jeune homme chauve mais ayant une épaisse touffe de cheveux sur le devant de la tête... pour qu'on puisse la saisir au passage.
Source: Info-Croatie |
«Le kairos,est un don, et le don est un kairos; l'intervention du dieu dans le sort des mortels en modifie la temporalité, et l'on comprend dès lors que l'un des sens de kairos ait désigné le moment fugace où tout se décide, où la durée prend un cours favorable à nos voeux. (...) L'irruption soudaine du kairos, c'est-à-dire d'un temps visité par le dieu, se marque en général chez Pindare, par l'apparition de la lumière. (...) Lorsque l'orage a bien enténébré la terre, soudain le vent faiblit, la pluie s'arrête, la nue s'entrouvre - et c'est l'embellie, une clairière de lumière soudain, dans un lieu de désolation. L'homme a senti le passage du dieu, et tel est le kairos. (...) Le kairos est une seconde d'éternité. »
Gilbert Romeyer Dherbey, La parole archaïque, PUF, Paris 1999, p. 11-12.