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Points de vue

Le blues et le sentiment d'appartenance d'un écrivain ojibway

Richard Wagamese

D'abord journaliste, Richard Wagamese se consacre désormais à la littérature. Il est l'auteur de plusieurs romans: Keeper’n Me,  A Quality of Light, Dream Wheels. Ces romans lui ont valu plusieurs prix littéraires. Originaire du nord de l'Ontario, il vit en Alberta.

L'histoire d'un homme qui a été chassé simultanément de deux lieux d'appartenance: sa famille et sa nation. Une histoire qui rappelle les déracinements semblables qui ont inspiré le blues.


Richard Waganese a d'abord raconté comment il avait découvert son grand-père à l'âge de vingt-cinq ans. Il avait été séparé de lui, comme du reste de sa famille, en devenant pensionnaire dans une institution d'enseignement éloignée, conformément à ce qu'exigeaient les lois canadiennes au cours de la décennie mil neuf cent-soixante.

Dans un article intitulé «Moan that particular Blues», paru dans le Utne Reader de juillet/août 2008, Richard Wagamese a trouvé des accents justes pour établir un lien entre le déracinement, le statut de réfugié et le blues.

«J’ai connu (mon grand-père) à l’âge de vingt-cinq ans. J’avais été séparé de ma nation  quand le gouvernement s’empara des enfants amérindiens et les jeta dans des familles loin de leurs territoires traditionnels et je n’ai pas revu ma famille pendant plus de vingt ans. Je ne savais même pas que j’avais un grand-père de même que j’ignorais que j’avais une histoire ou une culture vibrante, irrésistible et vivante. Mais tous deux m’attendaient si je voulais bien d’eux. »1

A la lumière de cette expérience ses propos sur le blues prennent tout leur sens.


«Le blues est né d’un peuple déplacé, jeté comme des épaves sur les côtes d’un rivage éloigné et inhospitalier. Il est né de la solitude, du désespoir, de champs qu’il fallait durement piocher pour trouver un peu de nourriture, et des besoins, des désirs et des rêves inassouvis et flétris comme des raisins au soleil. Un cri de douleur pour tout ce qui nous avait été arraché et un gémissement pour ce qui nous était offert en retour.

Quand je l’ai entendu la première fois je me suis mis à pleurer. Son rythme à quatre temps, c’était la basse continue de la douleur, la pulsation sous-tendant nos blessures et nos épreuves. Il me parlait de mon isolement, de mon manque d’ancrage dans une culture, d’un peuple disparu, d’une histoire brisée, d’une famille fracturée, éparpillée et jamais réunie. Le blues contenait tout cela et je l’ai embrassé. » 2

«C’est dans le blues que j’ai découvert l’univers sombre d’un petit garçon écrasé par des forces sur lesquelles il n’avait aucun pouvoir et qui ne comprenait pas la façon dont on séparait le lieu de vie du sentiment d’appartenance. Le blues me ramenait aux coups donnés pour assurer la discipline, à un bannissement conçu comme une cohésion et au choc des différences jamais mentionnées, jamais discutées et jamais guéries. Le blues me fit voir que je n’étais pas seul dans tout cela et qu’il contenait en lui la guérison. Il en est de même pour de nombreuses populations d’indigènes. Le blues vous autorise à crier. Il vous permet de ventiler tout ce que la vie a enfermé en vous de déchets, de colères, de rages et de proclamer pacifiquement que vous en avez ras le bol et que vous n’en serez plus jamais l’esclave. »2

1-Richard Wagamese, One Native Life: Reaching Grandfather,  Canadian Dimension Magazine, May/June 2007 issue

2- Richard Wagamese, Moan-That-Particular-Blues, Utne Reader, juillet-août 2008.
 


 

 

 

 

 

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Jacques Dufresne

L'éditeur de L'Encyclopédie de L'Agora analyse l'actualité à travers le thème de l'appartenance.
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